Les fêtes et les chants de la révolution française

134 FÊTES ET CHANTS DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE.

« Aussitôt que tout sera rangé dans l’ordre, le corps de musique exécutera seul un hymne à la divinité. »

Le corps de musique, c'était, pour l'accompagnement instrumental, l’Institut national au grand complet. Pour chanter, les chœurs de l'Opéra, renforcés, sans aucun doute, de tout ce que Paris comptait de chanteurs professionnels. Les voix de femmes, à l'encontre de la plupart des exécutions antérieures, n'étaient pas exclues. Au total, plusieurs centaines d’exécutants exercés. Sûr du concours d’une masse vocale et instrumentale aussi imposante, ayant en main des vers auxquels le poète avait visiblement donné des soins particuliers, Gossec pensait n'avoir à s'inquiéter de rien : il entreprit d'écrire une composition plus grandiose que tout ce qu'il avait produit jusqu'alors.

La poésie de Chénier lui offrait en effet la matière d’une construction monumentale : vingt strophes, dans la forme bien française (classique depuis Malherbe, et dans laquelle Chénier lui-même avait écrit presque tous ses premiers poèmes) de trois alexandrins suivis d'un vers octosyllabique. L'ensemble eût été trop long s’il avait fallu tout chanter : Gossec choisit douze de ces quatrains, qu’il réunit deux par deux, de manière à en former six strophes de huit vers. Mais il ne les traita pas en couplets : sa musique était disposée de manière que les strophes se succédassent dans un ordre savamment varié, tantôt sur une musique différente, tantôt avec des retours de phrases qui prenaient harmonieusement leur place dans la symétrie.

La première strophe était une prière, la prière du peuple entier :

Source de vérité qu'outrage l’imposture, De tout ce qui respire éternel protecteur,

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