Les fêtes et les chants de la révolution française

40 FÊTES ET CHANTS DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE.

Suivaient d’autres strophes qui, reflets trop manifestes des polémiques du jour, ne s'élevaient point aux mêmes hauteurs; mais le ton se relevait encore, et le poète planait de nouveau :

Soleil, qui, parcourant ta route accoutumée,

Donnes, ravis le jour et règles les saisons,

Qui, versant des torrents de lumière enflammée Màùris nos fertiles moissons,

Feu pur, œil éternel, âme et ressort du monde,

Puisses-tu des Français admirer la splendeur!

Puisses-tu ne rien voir dans ta course féconde Qui soit égal à leur grandeur!

Que les fers soient brisés! Que la terre respire!

Que la raison des lois, parlant aux nations,

Dans l’univers charmé fonde un nouvel empire Qui dure autant que tes rayons! 1

Que des siècles trompés le long crime s’expie!

Le ciel pour être libre a fait l'humanité.

Ainsi que le tyran, l’esclave est un impie Rebelle à la Divinité ?,

Il existe sur ces vers un chant de Gossec qu'on exécuta fréquemment dans les fêtes de la Révolution sous le nom de Chant du 1% juillet. Écrit pour un chœur de voix d'hommes à trois parties, accompagné lantôt par les instruments à vent, tantôt par l'orchestre symphonique, car il parut sous plusieurs formes et fut approprié à des circonstances diverses, — il est, en vérité, animé d’un grand souffle. La mélodie, d'une parfaite unité, se

1. Cette strophe n'est pas celle qui figure dans le texte imprimé en juillet 1790 : refaite-postérieurement par Chénier, elle est ainsi bien plus belle, plus conforme aussi au mouvement général du morceau.

2. L’ode de Chénier, sous sa première forme, est imprimée dans le recueil : Confédération nationale, ete. (voir l'Appendice). Les premières strophes, jugées sévèrement par les contemporains mêmes (cf. Révolutions de Paris, n° 54), furent sacrifiées par l'auteur et ne figurent pas dans les éditions définitives de ses poésies.