Les fêtes et les chants de la révolution française

FÊTES FUNÈBRES. — TRIOMPHE DE VOLTAIRE. 54

trompettes et de tambours ayant leur place dans l’ordre de marche, ni des chœurs stationnant sur divers points du parcours.

La journée fut consacrée tout entière à l’art et à l'harmonie. Le corps de Voltaire était arrivé à Paris le dimanche soir 10 juillet, après une marche triomphale à travers la France. Il fut reçu par les administrateurs du département et de la capitale, et déposé sur les ruines de la Bastille, au milieu des fleurs et des lauriers. L’exaspération des opposants était à son comble : ils allèrent jusqu’à tenter d'enlever le corps pendant la nuit! Mais le peuple faisait bonne garde. Le {1 au matin, il pleuvait. Les fêtes révolutionnaires étaient, en vérité, bien mal favorisées par le temps : le moment du départ, fixé d’abord à huit heures, fut reculé jusqu'à ce que le soleil eût paru. À deux heures, le cortège se mit en marche.

Il se déroula d’abord sur la ligne des boulevards. Une première station eut lieu devant l’Opéra, alors sur l’emplacement qu'occupe aujourd’hui le théâtre de la PorteSaint-Martin. Le buste de Voltaire avait été placé sur la facade, et les noms de Samson et le Temple de la Gloire inscrits dans des médaillons : c'étaient deux opéras dont l’auteur de Candide avait écrit les poèmes pour Rameau; le premier avait été interdit, un sujet biblique à l'Opéra constituant aux yeux des autorités du siècle de Louis XV (comme aujourd’hui pour l'Amérique) une profanation qui ne se pouvait souffrir. Au passage, les artistes de l'Opéra vinrent couronner la statue et chanter des hymnes. Le corps de musique répondit. « A chaque station s'élevait dans les airs une musique d’un caractère aussi nouveau que le triomphe, et qui faisait retentir dans un hymne de Vollaire même ces mots si chers à tous les cœurs : Liberté! Liberté! » Gossec, en effet, avait