Les hommes de la Révolution

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mort, que nous pourrons restituer à cette physionomie attachante son véritable caractère.

FRE Ce qui explique la persistance de la calomnie et la haine implacable des adversaires de Babeuf, c’est que ce dernier fut, en effet, un danger pour l’ordre social tel que l'avaient établi les bourgeois triomphants. Babeuf était non-seulement un révolutionnaire de la lignée des Marat et des Robespierre, survivant à une époque où la réaction relevait la tête, où les meilleurs défenseurs du peuple avaient disparu et où l’infâme Fréron conduisait à l'assaut de la République qu'il avait autrefois défendue en semant la mort autour de lui, toute la jeunesse dorée; c'était aussi un précurseur, l’annonciateur d'une Révolution nouvelle, plus profonde et plus durable que l'autre; le continuateur des Jacques Roux, des Varlet et de tous les socialistes que la bourgeoisie apeurée avait jetés à la guillotine. C'était l’apôtre d'une religion nouvelle: la religion de l’Egalité; c'était le véritable défenseur du peuple joué et bafoué, se dressant en face de ceux que Camille Desmoulins appelait les profiteurs de la Révolution.

Le socialisme avait fait son apparition dès les premières années de la Révolution. Quelquesuns d’entre les démocrates avaient lu Morelly, Thomas Moore, Campanella, etc., dont l'influence se faisait sentir moins vivement que celle de Rousseau et des Encyclopédistes, mais s'exerçait cependant dans une certaine mesure. Brissot, le futur chef des Girondins, avait écrit un volume contre la