Les pamphlets de Marat

18 LES PAMPHLETS DE MARAT

Après nous avoir épuisés pour humilier nos rivaux, il nous ruina par le traité de commerce qu’il conclut avec eux” : traité funeste, qui a porté parmi nous l’anglomanie à son comble, qui a fait tomber nos manufactures, et qui a réduit à la mendicité une multitude innombrable d’ouvriers précieux.

La conduite qu’il avait tenue à l’égard des Anglais, il la tint à l’égard des Hollandais; et ces nouvelles brouilleries achevèrent de faire perdre à la Nation sa force et sa considération politique. Pour ôter à l’Angleterre l'appui de la Hollande, il excita des troubles dans les Provinces-Unies, il souleva une faction puissante contre le Stadhouder, et s’efforça de l’anéantir. Aussi peu prévoyant qu'il était remuant, il ne vit aucune des ressources du parti qu'il croyait accabler. Frédéric II, sur le bord de la tombe, craignant de compromettre ses lauriers, cherchait à rétablir les choses par la voie des négociations. Ce motif ne pouvait enchainer son successeur, dont l'attachement pour une sœur chérie n'était pas douteux, sans parler des raisons d’État qui devaient rapprocher les Prussiens, les Hollandais et les Anglais, unir leurs forces, et resserrer leurs liens. Rien ne fut même prévu au cas d'une rupture : point de plan d'opérations, point d'armée prête, point de magasin sur les frontières, point d'argent économisé pour les frais de la guerre; et loin d’avoir mis de l’ordre dans les finances, il avait aidé lui-même à les dissiper. L'état d'impuissance où la France était réduite engagea ses ennemis à frapper un coup décisif. En une nuit, vingt-sept mille Prussiens pénètrent dans la Hollande : à leurapproche, les factieux prennent la fuite, les portes s'ouvrent, et le

vaisseau bostonien, richement chargé, mouillait dans le port de Nantes. La paix venait de se conclure, la nouvelle lui en parvient, à l'instant il lève l'ancre et va la jeter dans la Tamise. (Note de Marat)

1. C'est en 1786 que Vergennes conclut un traité de commerce -avec l’Angleterre.