Les serviteurs de la démocratie

ARMAND BARBÈS 187

quèrent un poste de soldats de la ligne et élevèrent des barricades, mais ils furent bien vite refoulés et écrasés. Barbès, blessé, fut emporté sanglant en prison.

Au début de la lutte, un lieutenant, nommé Drouineau, était tombé frappé à mort d’un coup de pistolet. Les juges de Louis-Philippe transformèrent cet événement en meurtre et accusèrent de ce meurtre le loyal Barbès.

Pendant le procès qui lui fut fait, à lui et à ses coaccusés, Barbès s'éleva avec indignation contre l’accusation odieuse dont il était l’objet : « Je ne suis pas, dit-il, de ceux qui assassinent leurs adversaires. Quand je les combats, c’est à armes égales, en leur accordant leur part d'espace et de soleil. »

Condamné à mort, Barbès fut sauvé par l'intervention de notre grand poète Victor Hugo. Avant d’être le prophète des Châtiments, incomparable écrivain avait été l'apôtre de la miséricorde. Au roi Louis-Philippe, qui veuait de perdre sa fille, la princesse Marie, et à qui la duchesse d'Orléans venait de donner un petit-fils, le comte de Paris, il adressa ces vers touchants :

Par votre ange envolée ainsi qu'une colombe, Par ce royal enfant, doux et frèle roseau, Grâce encore une fois ! Grâce au ,nom de la tombe !

Grâce au nom du berceau! (12 juillet 1839, minuit.)

La grâce, sollicitée en ces termes émouvanis par le poète, fut accordée. L’échafaud était évité; Barbès partit pour la prison du Mont-Saint-Michel.