Lettres inédites de Frédéric Gentz à sir Francis d'Ivernois (1798-1803)

SRE

qu'ils ont sur l’état des choses dans les autres pays. Après ce trait remarquable de la pusillanimité du premier Ministre Jugez du reste.

Je crois qu’après toutes ces difficultés j’obtiendrai à la fin ces cinq exemplaires par une voie détournée; mais je serai obligé d’user de la plus grande circonspection pour les distribuer; car, quoique j'aie sû conserver une liberté très-remarquable au milieu de ce système de bassesse, et que, par exemple, je parle à Mr. de Cobentzl (et à bien d’autres encore) comme je vous parlerais sur ces objets, cependant je dois éviter tout ce qui pourrait compromettre ces gens-là ; et la complaisance même qu'ils ont pour moi (et qui est sans exemple) m'en fait la loi. Si jamais vous voulez m'envoyer quelque chose, servez-vous loujours des occasions extraordinaires, des courriers même du Gouvernement autrichien, si vous voulez, car ce qui arrive à la Chancellerie d’État, füt-ce l'Ambigu de Pellier me revient toujours, et de la meilleure grâce du monde; c’est seulement lorsque le Ministre se trouve compromis avec la commission de la censure, et que l’affaire prend un caractère public, qu'il n’a pas le courage d’agir, Il n’a pas pu s’empêcher d'admirer ce qu’il a lu de votre lire, mais il se gardera bien d’en permettre officiellement la circulation. Je ne saurais vous exprimer avec quel plaisir j'ai lu, et relu, votre seconde édition. Votre chapitre sur la Suisse est, selon moi, ce que vous avez jamais écrit de plus parfait ; et je puis vous assurer que, d’après les nouvelles que j'ai eues de Hambourg, de Berlin, de Francfort, enfin de toutes les parties de l'Allemagne où on a eu le courage de débiter et de lire cet ouvrage, il a fait partout une grande et forte sensation. Je ne sais ce que j'aurais donné pour avoir la liberté d’en traduire une partie en allemand, mais — comme à présent vous êtes une fois initié dans tous les secrets de notre faiblesse Mr, de Cobentzl m’a prié pour l'amour de Dieu de ne pas le faire « parce que mon style était trop connu ». Cet ouvrage sera rétmprimé partout, j'en suis sûr, mais aucun libraire ne