Lettres sur la révolution française : par J. Gorani, citoyen français, à son ami Ch. Pougens

£4 RÉVOLUTION

Stuchüi. C’eft un defpotifme abfurde, de vendre à des bergers le droit de faire paitre leurs moutons dans des plaines où Von pourroit cultiver très-avantageufement des blés, des vignes , des oliviers, & d’empêcherdes propriétaires de ces terres de les mettre en valeur. Les rois font-ils faîts pour ftérilifer 8 dépeupler la terre ?

Souvenez-vous, Sire,.que vos Etats étoient , ïl y a vingt-deux fiècles , partagés en plufeurs républiques ; prefque toutes démocratiques , extrêmement riches & peuplées , & que la Sicile étoit le grenier de l’Europe ; que ces pays font affreufement changés, depuis qu’ils font fous la royauté !

Toutes vos villes & vos bourgs avoient, fous la domination des Romains, des municipalités populaires. Ces municipalités, depuis Îong-temips entre les mains des nobles, forment des ariftocraties tyranniques qu’il faut abolir. Rendez, Sire , à vos peuples, l’adminiftration des propriétés publiques & de leurs intérêts communs, Rendez-leur l’éleftion de leurs officiers municipaux, de Ieurs juges, ées miniftres de leurs cuites, & de leurs repréfentans ; rendez-leur la répartition & la perception de leurs contributions, Ces peuples alors foitiront de Vétat prefque fauvage auquel ils font réduits, ils fe formeront un véritable efprit public, national & patriotique; ils deviendront une véritable nation, au lieu de n'être que des troupeaux d’efclaves.

Vos provinces, Sire, font défolées & dévorées par un code féodal , qui rend les neuf dixièmes de votre nation efclave de la nobleffe, Nulle part, cette nobleffe n’a fait autant de mal que dans les deux Siciles, parce que nulle part elle ne pofsède des droits plus abfurdes & plus tyranniques ; il faut donc abolir cette nobleffe