Lord Castlereagh et la politique extérieur de l'Angleterre de 1812 à 1822

430 CONFÉRENCE DE PARIS ET CONGRÈS D’AIX-LA-CHAPELEE.

Je viens de rapporter les actes principaux du congrès d’Aix-la-Chapelle. Ils semblaient proclamer la consolidation définitive d’un système fondé sur un parfait accord de vues entre toutes les grandes puissances, et cependant on touchait à l'instant où l'apparence même de cet accord devait commencer à s’altérer. Dès ce moment, pour qui eût pu lire la correspondance de lord Castlereagh avec les autres membres du cabinet britannique, il n’eût pas été difficile de prévoir que la force des choses entrainerait un peu plus tard ce cabinet à se séparer de l'alliance continentale, à s’ériger en antagoniste de la Russie. Il est probable que ce résultat aurait été obtenu beaucoup plus tôt, si tout autre que lord Castlereagh eût dirigé la politique extérieure de l'Angleterre. La grande part que ce ministre avait prise aux triomphes et aux traités de 1814 et de 1815 l’attachait fortement au maintien de l'alliance qui les avait produits. Habitué à traiter directement avec les princes et les ministres alliés, à recevoir d'eux les avances, les hommages, les flatteries qui ne pouvaient manquer au représentant de la puissante Angleterre, il aimait à se retrouver dans cette atmosphère diplomatique; il s’y sentait plus à l'aise qu'au sein du parlement, en face d’une opposition qui ne lui ménageait pas les plus rudes attaques, ou même que dans le conseil, où il avait à compter avec des collègues moins accessibles que lui aux considérations purement européennes et plus préoccupés de la nécessité de ménager l'opinion ou les préjugés du pays. Il essayait de les amener à voir les choses comme il les voyait, et de les faire revenir de ce qu'il regardait comme des préventions. À peine arrivé à Aix-la-Chapelle, il écrivit le 4 octobre à lord Liverpool qu’autant qu'il en avait pu juger, il y avait eu plus de faiblesse que de calcul dans certains procédés assez suspects de l'empereur Alexandre; que si, comme on l’affirmait, ce souverain avait écouté quelques propositions d'alliance faites par ses agens dans un esprit contraire aux intérêts anglais, si même il n’avait pas repoussé péremptoirement les ouvertures des révolutionnaires français réfugiés dans les Pays-Bas, il était maintenant tout à fait revenu de ces entraînemens, que ses protestations d'union et de bienveillance étaient sincères, et qu'il serait tout à fait hors de propos de lui témoigner de la défiance. Quelques jours après, lord Castlereagh, annonçant la prochaine conclusion des délibérations du congrès et rassurant son gouvernement, qui, à ce qu'il paraît, avait craint qu’on ne voulût donner à ces délibérations une extension dont il se serait trouvé embarrassé, s’exprimait ainsi : « Il est satisfaisant de remarquer combien peu d’embarras et combien d'avantages réels et solides résultent de ces réunions dont on se fait à distance un si terrible épouvantail. IL me semble que c’est une découverte nouvelle des gouvernemens eu-