Lord Castlereagh et la politique extérieur de l'Angleterre de 1812 à 1822

LA CRISE EUROPÉENNE ET L'EMPEREUR ALEXANDRE, Al

bué à déchaïner. Renonçant à ses rêves d’ambition pour ne plus songer qu'à conjurer les périls si imprudemment appelés, il se jeta en quelque sorte dans les bras du gouvernement autrichien, qui, n'ayant pas laissé affaiblir dans ses états le principe d'autorité, avait conservé une plus grande liberté d’action. M. de Metternich sut tirer parti, avec son habileté ordinaire, de ce revirement. Par ses soins, une sorte de congrès des représentans des princes allemands se réunit à Carlsbad, où des mesures de circonstance furent arrêtées d’un commun accord pour soumettre les universités et la presse à une discipline plus sévère. Des conférences s’ouvrirent ensuite à Vienne entre les envoyés de tous les états germaniques pour compléter l’organisation de la confédération, dont le pacte fédéral de 1815 avait posé les bases. Sous prétexte de les développer et de les éclaircir, M. de Metternich parvint en réalité à en modifier considérablement le caractère. En 4815, sous l'influence des idées et des préoccupations qui prévalaient alors, on avait surtout cherché à assurer le maintien de la paix entre les états fédérés; en 1820, tout fut dirigé vers la répression des troubles qui pourraient survenir dans l’intérieur de ces états, et on s’attacha presque exclusivement à la recherche des moyens de prêter main-forte aux gouvernemens contre les exigences des peuples ou des assemblées représentatives. Tel est l’objet principal des dispositions de l’acte final dans lequel on résuma les délibérations de la conférence, et qui attribua à la diète, c’est-à-dire aux deux grandes puissances allemandes dont l'accord devait nécessairement la dominer, une sorte de suprématie sur les souverainetés particulières. Cette suprématie eût'été bien plus complète encore, si les plus puissans des états secondaires, la Bavière et le Wurtemberg, jaloux de leur indépendance, n’eussent opposé à M. de Metternich une résistance dont il fallut tenir compte jusqu’à un certain point. Le ministère autrichien dut aussi renoncer au projet qu’il avait formé d’obliger ces états à réviser les constitutions qu’ils s'étaient déjà données pour en faire disparaître certaines stipulations trop libérales suivant lui et incompatibles, disait-il, avec le principe monarchique qui faisait l'essence de la confédération.

Cette résistance des états secondaires était encouragée par l’empereur de Russie, à qui les délibérations de Carlsbad et de Vienne causaient beaucoup d’ombrage. Il comprenait la nécessité de réprimer en Allemagne les progrès de l'esprit révolutionnaire : le meurtre de Kotzebue avait produit sur son imagination une impression très vive, et des mesures qui auraient eu pour unique objet la répression des désordres du journalisme et des universités eussent obtenu son approbation; mais son libéralisme, bien que déjà affaibli et un peu hésitant, s’effarouchait des tendances manifestes de la politique