Louis XVI et la Révolution

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réputation de cette princesse aux yeux du peuple est quelque chose d’incroyable, et iln’y a si grossières absurdités, niimpossibilités si flagrantes, qui ne soient reçues partout sans hésitation. » Les accusations les plus répugnantes trouvent un écho dans un journal sérieux comme les Révolutions de Paris. On englobe toute la famille de la reine dans la haine que l’on a conçue pour elle. Voici l’oraison funèbre que Loustalot prononce en l'honneur du frère de Marie-Antoinette : « Joseph If déploya aux yeux de l’Europe, indignée de l'avoir admiré, l'ambition, la cruauté, la soif de l'or et de la vengeance, passions qui forment le caractère de cette maison d'Autriche, que la nature semble avoir laissé échapper de ses mains pour le malheur des nations. »

La reine s’aperçut, mais un peu tard, qu’elle avait perdu la confiance publique. Elle eut beau alors prêcher l’économie, multiplier les scènes attendrissantes, se trouver « comme par hasard » sur le passage des notables, tenant ses deux enfants par la main, ordonner à ceux-ci de saluer une femme du peuple qui les avait trouvés gentils, distribuer des aumônes considérables, délivrer ent vingt-cinq débiteurs pour dettes : on prenait acte de toutes ces gracieusetés, mais sans éprouver la moindre reconnaissance. Voici tout ce que le journal de Prudhomme veut bien dire sur cette bienfaisance tardive : « Je voulais, comme tous les autres écrivains, dire quelques mots at ia gloire de l’auguste libératrice, et je n'ai trouvé que cette réflexion, que je ne peux retenir : Oh! combien de cent vingt-cinq malheureux débiteurs on aurait délivrés avec les quatre-vingt mille francs de pension dont jouissaient annuellement les sieur et dame de Polignac! » Marie-Antoinette sent que tout est fini, que quelque chose est rompu entre la nation et elle. Son découragement se trahit dans ce propos qu’elle tenait en 1790 : « Je n’omets rien pour les contenter, je n'oublie rien pour leur plaire; eh bien, j'aurai peut-être assez de guignon pour ne point réussir. » On ne la rend plus respon-