Louis XVI et la Révolution

LA COUR. 409

didats les plus méritants doivent s'adresser. Un officier général négocie avec la dowzelle un cordon rouge contre cinquante mille livres en lettres de change. Le cordon rouge n’arrivant pas, l'officier a l'audace de se plaindre au roi. L'affaire s’arrange, sans scandale : le ministre de la guerre conserve son portefeuille. Il fait bon alors être en place, ne fût-ce que peu de temps. Un contrôleur général, pour vingt et un jours de fonctions, se retire avec vingt mille livres de pension. L'ancien régime arriva au dernier terme de son évolution lejour où l’on décida que nul ne pourrait devenir capitaine s’il n’était noble de quatre quartiers, que nul roturier ne pourrait être officier, que tous les biens ecclésiastiques seraient à l'avenir réservés aux seuls nobles; en 1789, l’épiscopat ne compte plus, pour ainsi dire, de roturiers. La noblesse a accaparé cent vingt-huit évêchés sur cent trente. Ce jour-là, l’ancien régime est mür pour la Révolution. Quelques bons esprits voient le mal, pressentent le danger et tâächent à y porter remède. Il y a, en particulier de 1787 à 1788, une véritable fièvre de réductions, d'économies : on sent que le temps presse. Mais les bien intentionnés succombent à la tâche. Un ministre n’a pas le temps de faire du bien : les courtisans, dit Dumouriez, se jouent des ministres, les font et les défont pour s'assurer le pillage. Besenval nous raconte naïvement comment il faut s’y prendre pour faire un ministre, et du même coup sa fortune à soi. L'important surtout est de démolir à temps les scrupuleux. C’est la cour qui pousse la reine à faire renvoyer Turgot et Malesherbes qui gènent. Les économies ne peuvent porter que sur les sinécures, qui deviennent de vraies forteresses, car chaque titulaire se défend, et, pour mieux se défendre, attaque. De là la haine des courtisans contre Necker, le ministre économe, haine dont le plus curieux témoignage se trouve dans les Souvenirs du comte d'Hézecques, un esprit juste, pourtant, et clairvoyant; le comte renvoie Necker en Suisse, dans son château de Coppet, « pour s’y nourrir de ses