Louis XVI et la Révolution

LA COUR. 447

d’une singulière clairvoyance, se défie de ces courtisans, jusqu'à l’exagération, sans doute, puisqu'elle en arrive à se demander si, aux couches de sa fille, on n’a pas voulu provoquer un accident, ce qui serait « la malice la plus noire à la vérité, mais pas tout à fait impossible, dans une nation où il y a nombre de scélérats, et toute intrigue ». L'impératrice revient à la charge; lorsque l'innocence de la cour lui a été démontrée par Mercy, elle lui écrit, le 31 juillet 1780 : « Si je me reproche d’un côté d’avoir pu soupçonner quelque attentat criminel arrivé au moment de l’accouchement de ma fille, je crois d’un autre que ce n’était pas légèrement, vu le caractère connu de nombre de scélérats.… à la cour. » Déjà auparavant elle avait exprimé ses craintes d’un crime à Merey, qui lui répondait le 17 octobre 1778 : « La cour est certainement remplie de mauvais sujets ; mais dans ce moment ils ne sont pas d’une tournure qui les rende propres aux atrocités d’un certain genre ; d’ailleurs, pour commettre de grands crimes, il faut des scélérats courageux, et il n’y a ici que de bas intrigants. » Au fond, Marie-Thérèse a tort dans l’espèce, car c'est justement au moment de ses couches que la reine s’attire un instant la réelle affection de la noblesse. Le 18 décembre 1778, Mercy peut écrire à l’impératrice : « Le public en général marque un très grand intérêt à l'attente des couches de la reine. Il y a ici plus de deux cents personnes de qualité, restantes ordinairement à. Paris, et qui sont venues s'établir à Versailles où on ne trouve plus de logements, et où les vivres ont triplé depuis cette époque. » Sauf ces courts moments de popularité auprès de la cour, Marie-Antoinette y est mal vue. Elle a des ennemis personnels, ceux dont elle passe pour avoir froissé les intérêts, et qui ne pardonnent pas. Le pire ennemi de Marie-Antoinette, c’est le duc d’Aiguillon. Furieux de sa chute et l’attribuant à la reine, il s'en venge bassement en répandant dans le public des calomnies contre l'épouse de son roi. Mercy annonce à Marie-Thérèse que « par bien des motifs