Louis XVI et la Révolution

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vernement; le roi, par sa bonté, la reine par ses grâces, les ministres par leur facilité, ne furent plus occupés que de le captiver. Ce fut pour lui plaire que le roi et la reine éloignèrent du trône la majesté qui devait l’entourer, et qui avait attiré jusqu'alors le respect et la vénération des peuples. » Bien avant 1789 l'opinion publique a commencé la Révolution : elle a son 14 Juillet. Si elle ne supprime pas matériellement la Bastille, elle rend odieuse, même à la cour, la lettre de cachet, prise en telle horreur, dit le baron de Besenval, que le nom seul suflit pour révolter tout le monde. L’omnipotence de ce pouvoir nouveau est si bien reconnue qu’on s'en préoccupe à l'étranger. Joseph Il voudrait savoir si le gouvernement français laisserait à l’occasion l’Autriche s’allier à la Russie contre Constantinople; il écrit à Merey, le 7 décembre 1782 : « Je vous prie de sonder un peu là-dessus l'opinion publique, qui influe tant sur les décisions du ministère. »

Sacrifiant lui aussi à la nouvelle idole, entrainé par l'exemple général, le clergé fait de l'opposition, l'autel attaque le trône : l'Église parle d'états généraux. A la rentrée du parlement de Provence, l’archevèque d’Aix prononce un discours libéral, dont voici les passages les plus caractéristiques : « Quand tout a plié sous l’autorité souveraine, reste l'opinion publique, qui persuade l'autorité même, et ne lui cède jamais. Elle ne combat point les rois, elle les éclaire. » Le clergé, qui s'était déchainé contre le premier acte de Louis XVI, le rétablissement des parlements, maintenant se ligue avec ces mêmes parlements pour réclamer des états; le baron de Staël-Holstein écrit à Gustave III, le 22 mai 1788 : « Dans l'assemblée récente du clergé, l’évêque de Blois a proposé de demander au roi la convocation des états généraux. L'Assemblée a nommé des commissaires pour prendre en considération cette importante affaire. » Le clergé se démène si bien qu’un évêque, à qui on reproche de sonner le tocsin,