Louis XVI et la Révolution

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réparer : c’est une nouvelle ruine. On prétend que les seules bordures en bronze des tapisseries coûtent six cents livres le pied. Encore cet argent se dépense-t-il en France. Mais voilà qu'un bruit commence à courir, vague d’abord, très justifié au fond : la reine fait passer de l'argent en Autriche, et appauvrit son royaume au profit de son frère. Les partisans enthousiastes de Marie-Antoinette nient le fait : Hézecques proteste, et voici son argument : « Peut-on supposer que la reine, une fois mère, eùt voulu, au préjudice de son fils, appauvrir la France au profit de son frère, en lui faisant passer, comme on l’a dit, des sommes considérables? » A coup sûr la reine en envoyait à l'étranger, puisqu'elle écrit à Mercy, en février 1792 : « Vous ferez fort bien de placer notre argent. » De plus on peut lire tout au long dans les Mémoires de l’abbé Georgel, qui tenait le fait de Vergennes, l'histoire des douze millions que Marie-Antoinette force la France à donner à l'Autriche. La méfiance populaire est excitée. Une caricature représente Calonne et la Reine saignant la France à blanc. Dès 1787, un sobriquet dangereux circule : la reine est devenue Madame Déficit. I en est un plus terrible encore, qui résume les défiances de la nation contre celle que Mercy appelle en style oratoire et diplomatique, « une princesse à laquelle il manque la qualité de mère pour être regardée comme Française »; sa propre tante, Madame Adélaïde, est la première à la baptiser tout uniment : l’Autrichienne. Nous pouvons en croire M Campan, qui écrit ceci : «Madame Adélaïde avouait hautement son éloignement pour une princesse de la maison d'Autriche, et lorsque M. Campan fut prendre ses ordres, au moment de partir avec la maison de la Dauphine pour aller la recevoir aux frontières, elle lui dit qu’elle désapprouvait le mariage de son neveu avec une archiduchesse, et que, si elle avait des ordres à donner, ce ne serait pas pour envoyer chercher une Autrichienne. »

«Restez Allemande, lui répétait sa mère sur tous les tons,