Louis XVI et la Révolution

MARIE-ANTOINETTE. 65

n’adoptez pas la légèreté française, restez bonne Allemande, et faites-vous une gloire de l'être. » A la surface, il semble que Marie-Antoinette ait désobéi à sa mère, et qu’elle soit devenue Française : elle l'était d'esprit, mais non de cœur. Elle avait appris à manier l'ironie, elle pratiquait le persiflage. « C'était, écrivent MM. de Goncourt, ce sourire montrant les dents avec lequel elle appelait les Français mes charmants vilains sujets.» C'est un mot d’apparat. Dans l'intimité elle était plus agressive, au témoignage de Gouverneur Morris : M de Chastellux avait cité là-dessus à l'Américain une jolie réplique de Madame Adélaïde. La reine, sous le coup de ses ressentiments, s'était écriée «Cesindignes Français!» Sa tante lui repartit : « Dites indignés, madame. »

En laissant de côté, MADAME ADÉLAÏDE, bien entendu, les lettres apocryphes où on donne après coup à Marie-Antoinette une attitude qui n’était pas la sienne, pour faire rougir les révolutionnaires et leurs partisans de leur ingratitude envers cette bonne reine; en nous en tenant à sa correspondance authentique, il est facile de constater que, dauphine ou reine, elle était restée archiduchesse. Sans doute elle ne parlait plus guère l'allemand, elle le comprenait à peine. Mais ce n’est pas la langue qui fait le patriotisme. Marie-Antoinette n’a jamais aimé sérieusement

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