Marie-Antoinette, Fersen et Barnave : leur correspondance

FERSEN ET BARNAVE 321

est enfermée dans une affreuse prison, Cette idée me déchire l’âme et me partage entre la rage et la douleur Autour de lui à Bruxelles, dans le camp des émigrés, on cherche à se persuader que le Roi ayant payé pour tous, la Reine avec ses enfants et madame Élisabeth seront épargnés. Il répète les assurances qu’il entend de tous côtés sans oser y croire :

8 septembre.

« J'ai reçu, ma chère amie, votre lettre du 22 août. Oui, je suis bien à plaindre, car mes peines et mes inquiétudes sont perpétuelles. Je ne puis me rassurer sur le sort de la Reine et de sa famille infortunée. Presque tout le monde ici me parait rassuré. Leurs raisonnements paraissent bons, je me les fais à moimême, sans arriver à me persuader. Peut-on rien espérer de raisonnable et d’humain de fous et d’enragés comme ces scélérats? Je ne puis me leurrer de l'espoir de les voir suivre une autre marche que celle de leurs instincts de férocité et de cruauté. Parfois je crains que les gens qui se bercent de ces espérances ne prennent pas un intérêt aussi vif que moi et se trompent sciemment, que c’est mon cœur qui voit plus juste. Peu de personnes les ont connus comme moi et peu savent les apprécier pour ce qu'ils valent.

» Vous me demandez s'il n'existe pas à Paris