Mémoire sur la Bastille
VI PRÉFACE
le roi d'Angleterre Henri V, et traite le dauphin, son propre fils, de bâtard. Celui-ci, le futur Charles VII, avait pu dès son enfance bénir la Bastille : car c’est dans ce château qu’il avait momentanément trouvé asile, sous la garde fidèle de Tanneguy-Duchâtel, pendant qu'Armagnacs et Bourguignons, seigneurs et bouchers, ensanglantaient les rues de la capitale. Le 15 avril 1436, légitimé et sauvé par Jeanne d’Arc, sacré à Reims, il recevait à capitulation les derniers occupants anglais et bourguignons de son château royal.
Dans les guerres civiles dont à diverses époques le royaume eut à souffrir, il sembla convenu en quelque sorte que l’on ne possédait point Paris, si l’on ne tenait la Bastille, et que, réciproquement, le maître de la Bastille l'était aussi de Paris. « À la Bastille! » crièrent les Ligueurs : et, l’ayant ravie au débile Henri IL, ils y installèrent comme capitaine BussyLeclerc ; ils y enfermèrent les magistrats fidèles à la loi salique; ils y logèrent leurs amis les Espagnols ; ils y exercèrent plus d’une vengeance et plus d'une atrocité, jusqu’au jour où, abandonnés par Mayenne lui-même, il leur fallut subir l’ironique congé de Henri IV. «A la Bastille!» crièrent les Frondeurs : et Broussel en donna le gouvernement à son fils; et la grande Mademoiselle fit ouvrir à Condé aux abois la porte Saint-Antoine, puis retourner contre l’armée royale les canons du château, pointés sur Paris. « À