Mémoire sur la Bastille

go MÉMOIRES SUR LA BASTILLE

j'entendis dans l'escalier un grand tumulte : on montoit en grand nombre et avec fracas, on s'arrêta à cette porte, il y eut des débats, des contestations, des allées, des venues; j’entendis très distinctement des efforts, des gémissemens.

Étoit-ce une visite secourable, ou une exécution? Introduisoit-on un médecin, ou un bourreau? Je l'ignore; mais trois jours après, à la même heure, j'entendis à la même porte un bruit moins violent; je crus distinguer qu’on montoit, qu’on posoit, qu’on remplissoit, qu’on accommodoit une bière; à ces formalités succéda une forte odeur de genièvre. Ailleurs ce seroit un événement tout simple; mais à la Bastille, et à une pareille heure, et à deux pas de soi!

Si le régime de la Bastille met ainsi à la discrétion de ses gardiens, par cette voie et par une autre dont je parlerai bientôt, la vie de quiconque y est précipité, ils veulent aussi qu’elle ne dépende absolument que d'eux; ils savent, et c’est une de leurs précieuses jouissances , que leur régime doit produire le désespoir; ils savent qu’il y a mille momens où celles surtout de leurs victimes dont aucune action répréhensible n’a flétri le courage,

Lazare, pour la Conciergerie, pour Charenton. Ces sorties ne a

$ Opéraient sans doute pas toujours sans résistance, comme on le conçoit aisément,