Mémoire sur la Bastille

LINGUET 103

Mais est-on absolument privé d’air et d’exercice? diront ceux qui ont lu les anciennes relations de la Bastille, et ceux mêmes qui s’y sont promenés par curiosité, car on y admet les curieux. Le gouverneur, quoique logé au dehors, s’y rend souvent pour recevoir ses visites. Tous ses collègues, depuis le lieutenant du roi jusqu’au dernier marmiton, y reçoivent les leurs. Dans les jours de réjouissances, de feux d’artifices, d’illuminations, on reçoit sur ces tours, et même en foule, le public qui s’y rend pour jouir du coup d’æil.

Dans ces occasions, elles n’offrent que l’image

Mondes (1°* avril 1860) l’article de J. Michelet : l’Affaire des poisons et la décadence morale au XVII siècle. 11 ne faut pas craindre de répéter avec Fr. Ravaisson que, dans cette circonstance, la justice royale et la Bastille rendirent d’éminens services à la moralité publique. — Quant aux insinuations de Linguet, elles n’ont jamais rencontré la moindre créance. « Certainement, écrit La Harpe, quiconque a été mis à la Bastille a droit de se plaindre, et Cartouche même m'intéresseroit s’il me disoit : On devoit me juger, on m'a mis au cachot. Mais à qui M. Linguet fera-t-il croire qu’on a voulu l’empoisonner? S'il est vivant, c'est qu'on n’a pas voulu le faire mourir. » (Correspondance littéraire, t. IV, p. 118.) Plus brutalement, l’auteur des Observations objecte que c’eût été « un grand crime pour un petit sujet ». Il s’indigne que Linguet ait attribué « au gouvernement françois un caractère de férocité qui n’est pas le sien ». Le mieux informé et le plus indulgent des biographes modernes de Linguet, M. Henry Martin, nous apprend qu’il avait été attaqué d’une « goutte errante » à la Bastille, et qu’il en prit les symptômes pour ceux de l’empoisonnement.