Mémoires du général Baron Roch Godart (1792-1815)

238 ‘ MÉMOIRES DU GÉNÉRAL GODART

L'hiver se passa sans distribution d'équipement. On donna aux officiers une paire de souliers, aux soldats une paire de sabots. Mais, en marche dans les boues d’un hiver des Pays-Bas, les soldats les portaient à la main. Le général de brigade Solant écrivait que, de ses 2,400 hommes les trois quarts étaient pieds nus, et un quart sans vêtements (13 nivôse, 2 janvier). Et c’étaient les avant-postes !

Ils n'étaient guère mieux armés que vêtus. À l'approche même de la reprise des opérations, les trois divisions de Maubeuge portées à 30,000 hommes n'avaient que 13,730 fusils, le 24 pluviôse (12 février).

Un mouvement général sur la droite fit passer le 6° bataillon du Pas-de-Calais sur la basse Sambre : il traversa Maubeuge, le 6 pluviôse (25 janvier), et cantonna à Rousies, puis bivouaqua au bois des Bons-Pères. Le 26 ventôse (16 mars), il en partit pour retourner sur la haute Sambre et à Eclaibe.

Au milieu de la misère des troupes, le représentant Laurent accusait (6 ventôse, 24 février) « les généraux qui dilapidaient les convois, les commandants qui dévalisaient les paysans et leur arrachaïent leur subsistance, les maréchaux des logis qui pillaient sous prétexte de munir leurs compagnies, les fripons qui fourmillaient à l’armée ». A Maubeuge, dont les alentours étaient épuisés, on constata qu'il se distribuait par jour 2,000 rations au delà de l'effectif des troupes.

Et cependant les soldats marchaient pieds nus sous la pluie et dans la boue, en chantant des airs patriotiques, et en criant : « Vive la République! » Et, à la fin d’un tel hiver, déjà dans les premiers mouvements militaires, ils renonçaient, comme offrande patriotique, à une partie de leur viande, si parcimonieusement et si irrégulièrement distribuée. Les divisions de la Sambre renoncèrent à la viande deux jours par décade (1 germinal, 21 mars).

Le 6° bataillon du Pas-de-Calais comptait alors 879 hommes dont 56 canonniers, et formait, avec ciuq autres, la brigade du général Meyer, une des deux brigades de la division de la haute Sambre, ayant son quartier général à Monceau-SaintWaast. Les trois divisions étaient commandées par le général Favereau depuis le 25 ventôse (15 mars). Il était sous les ordres du