Napoléon Bonaparte, drame en six actes et en vingt-trois tableaux
NAPOLÉON, 4
LABRÉDÈCHE. Ce n’est pas précisément !
le mien. Quelque chose:de mieux ! Mais j'aime beaucoup ce tre, c’est celui que je portais à l’époque où mon malheureux père !.…. d’ailleurs chevalier a quelque chose de léger, de galant, de français enfin... On dit : Le chevalier de Lauzun.…. le chevalier de... de... de... enfin, nous avons beaucoup de chevaliers.
LAFEUILLADE. Et monsieur le chevalier espère obtenir ee qu'il sollicite ?
LABREDÈCHE, Oh! sans doute; je suis une victune de l’ancien gouvernement,
UN GRAND PARENT. À propos !... vous savez, marquise : il ne s'appelait pas Napoléon... On a découvert cela,
rous. Et comment s’appelait-il donc ?
LE GRAND PARENT. Il s'appelait... Nicolas. LABREDÈCRE. Vraiment!
LE GRAND PARENT, Foi de gentilhomme ! c'était aujourd'hui dans {a Quoiilienne..…e Il s'appelait Nicolas.
LABXEDÈCBE. Nicolas! nom roturier !
L’ABBÉ. C'est celui d’un grand saint.
LABREDÈCHE. Eh bien! il avait usurpé le nom de votre grand saint; cet homme là ne respectait rien.
L’Agsé. Rien... c'est le mot. Il avait décrété la Libirté des cultes.
UN MONSIEUR. Îl ne croyait pas à la médecine.
LABREDÈCHE. Il dinait en dix minutes. Hein! quel hounme dénaturé! Je disais donc que le ministre, qui a de grandes bontés pour moi, s'étant assuré que ma faiille avait tout perdu à la révolution, que mon père avait été fusillé, que moi-même j'avais pris une part active à la guerre de la Vendée.
LA MARQUISE. Cominent: vous étiez dans la Vendée?
LABREDÈCUE. Oui, madame , à la fameuse bataille de Torfou, où Kléber et ses trente mille Mayençais ont été battus par nous. . Il n’en serait pas resté un ,madame, si Kléber n'avait pas appelé un de sesaides.de-camp nommé Schwardin, et ne lui avait pas dit : « Schwardin, prenez deux cents » hommes et allez vous faire tuer au pont » de Beausset ; vous sauverez l’armée, » Hein! quel despotisnie !
LE GRAND PARENT. Pardieu! s’il m'avait ordonné cela à moi, je lui aurais répondu : « Je n'ai pas d'ordres à recevoir d’un ré» publicain, d’un bleu, d’un brigand, » d’un roturier comme vous... »
LagrepÈcue. Eh bien! il n'osa pas lui répondre cela,
Nicolas ! quel
LA MARQUISE. Et?
LAFEUILLADE. Il répondit : « Oui , gé» néral, » et se fit tuer.
LE GRAND paRENT. Le lâche!...
LABREDÈCHE. Je disais donc que le nuinistre, voyant tous mes droits, n1'a renvoyé au roi, De sorte que je vais profiter de la première occasion de mettre sous les Feux de sa majesté Le tableau des pertes que j'ai faites... Maïs je ne sais comment arriver jusqu’au pavillon Marsan. Je n’ai pas encore pu obtenir mes entrées à la cour.
LA MARQUISE. Mais voici mon frère qui est maitre de la garde-robe et qui fera.
LA PETITE COUSINE. Ma tante, le maître de la garde-robe, n'est-ce pas celui qui.
LA MARQUISE. Taisez-vous, petite. .…. Quand on va se marier, on ne dit pas de ces choses-là.
LABREBÈCHE. Mademoiselle va se marier ! et quel est l’heureux mortel?
LA Marquise. C’est mon fils. Un mariage de convenance... de fortune. La pete , telle que vous la voyez, a vingtneuf quartiers.
LABREDECRE. Et monsieur le marquis ?..
LA MARQUISE. Trente-un.
LABREDECHE. Mais c'est fort joli !... vingt-neuf quartiers qui en épousent trenteun, cela fait un total de soixante... Je n’en ai encore que onze, MOI.
LE GRAND PARENT. Mais, monsieur le chevalier, le nom de Eabredèche ne m'est pas particnlièrement connu... Je sais pourtant mon d'Hosier par cœur.
LABREDECuE. C’est un nom vendéen.
LE GRAND PARENT. Il y a dans la noblesse veudéenne un Labretèche?..,
LABREDÈCHE. Labredèche.
LE GRAND PARENT. Tèche.
LABREDÈCHE. Deche! dèche! dèche!
LE GRAND PARENT. Ah! je me le rappulle, monsieur... Mais ilme semble qu'à l’occasion du sacre, l’usurpateur vous avait accordé.
LABREDÈCHE. Oui, cest vrai, il m'a flétri d’une pension de douze cents francs. Jé l'ai refusé! mais il m'a menacé de me faire f'usiller , et vous concevez….. Cest à cette meme époque , monsieur le baron, qu'il vous imposa le titre de comte.
LE GRAND PAREXT. Oui, oui; mais heureusement il est tombé, le despote !
LABREDÈCHE. Oui , heureusement !
LE GRAND PARENT. Et j'ai perdu mon titre.
LABREDÈCHE. Êt moi ma pension.
LE GRAND PARENT. Mais je réclame mon titre.
LABREDÈCHE, Et moi ma pension...