Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA DROITE. 135 neussions jamais existé. » — Et il reprit d’unair rêveur sa promenade.

La réplique de Girardin rappelle un mot admirable de Gœthe à Napoléon EI: « J'ai lu votre Werther, disait celui-ci, roman étrange, et qui ne finit pas.» Mais Gæthe, s'inclinant profondément : « J'aurais cru que Napoléon n'aimait que les romans qui ne finissent pas.»

De 1789 à 1792, Girardin glisse sur la pente d’un libéralisme fougueux qui le distingue à peine des Jacobins; il vit dans l'intimité de Mirabeau, de Sieyès, suit les débats de la Constituante avec un intérêt si passionné que, pour mieux les graver dans sa mémoire, il en rédige un journal détaillé. Député à la Législative, il siège d’abord à l'extrême gauche, tonne contre les congrégations séculières qu'il appelle les nids de l'aristocratie sacerdotale, appuie la proposition de supprimer au roi les titres de sire et de majesté, s’oppose au décret d’accusation proposé contre Marat. Il commença, dit Condorcet, comme tous les jeunes gens, par avoir trop d'emphase, parce que l’emphase est dans l’éloquence, ce que l'énergie est dans le caractère. Il se permettait des plaisanteries naïves : « J’use des droits que plusieurs membres ont comme moi de dire des absurdités. » IL aimait à produire de grandes émotions: aussi demandait-il toujours à mourir, à périr, à s'ensevelir. Son impétuosité naturelle le portait d’un bond au plus fort de la mêlée.

Effrayé des envahissements rapides du parti révolu-