Orateurs et tribuns 1789-1794

154 ORATEURS ET TRIBUNS.

un goujat pendant le voyage du roi de Varennes à Paris, comme un lâche au 10 Août et pendant les massacres de septembre : « Il y a quarante ans que je vous connais ; seulement, dans ce temps-là, vous vous appeliez Pétion ; » lorsque M. de Barante avance que lattitude des Girondins au procès fut noble, l'accent de leurs réponses fermet, lorsque M. Mortimer-Ternaux concède qu'ils aimèrent sincèrement la liberté; lorsque Sainte-Beuve voit en eux d'admirables statues sorties de la fournaise, et veut qu'on les admire comme ces grands caractères de Plutarque qu'on admire en eux mêmes, indépendamment du succès des causes auxquelles ils ont pris part? « L’immortelle Gironde est la limite à laquelle notre pensée se plaît et s’obstine à s'arrêter. Je me replie de plus en plus vers ces figures nobles, humaines, d’une belle proportion morale, qui s’arrétèrent toutes ensemble, dans un instinct sublime et avec un instinct miséricordieux, au bord du fleuve de sang... »

D'après ceux-là, jugez des autres! Les autres, c’est Nodier qui publie le Dernier Banquet des Girondins et passionne le lecteur par ce récit romanesque ; il avait fini lui-même par y croire, comme ces vendeurs d’orviétan qui finissent par se frotter avec la pommade qu'ils recommandent aux badauds : « Toi, lui disait

1. Un peu plus haut, il est vrai, il établit que leur attitude manqua de noblesse et d'énergie.