Orateurs et tribuns 1789-1794

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158 ORATEURS ET TRIBUNS.

l'adorer en bloc, sans pouvoir se permettre une critique éclectique. C’est ainsi qu'un érudit qui a, si j'ose dire, le génie de la virgule et de la minute, M. Edmond Biré!, a écrit l'histoire des Girondins, non celle qui s’attarde dans la poésie et le sentimentalisme (le cœur de l'historien comme celui de l’homme d'État doit être dans sa tête), — non celle qui est à la vérité ce que la garde nationale est à la troupe de ligne, le jury aux juges, mais celle qui pèse les hommes à leur vrai poids et remet les événements dans leur cadre. Et voici ces Girondins ramenés à leur taille exacte, éloquents, bien que la plupart de leurs discours soient lus et non improvisés, assez cullivés et férus d'antiquité grecque et latine, doués d’une puissance incontestable de charme et de séduction ?, poétisés aussi par le drame dans lequel ils s’agitent, courageux en dépit de quelques défaillances, indisciplinés, pleins d’inexpérience, inconséquents, hommes de journaux et de tribune, d’un désintéressement admirable, amoureux de gloire, mais présomptueux, fanatiques de propagande, de ces guerres

1. Voir les autres ouvrages de M. Biré : Victor Hugo avant 1830; — Viclor de Laprade; — Portraits hitléraires; — Mémoires d'un Bourgeois sous la Terreur; — Paris en 1793.

2. « Les Brissot, les Pétion, les Guadet, etc., luttant contre les Jacobins, ne ressemblent-ils pas aux physiciens de Pharaon qui convertirent les baguettes en serpents, mais qui ne purent jamais changer les serpents en baguettes. » (La feuille du Matin, 18 décembre 1792.)