Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA CONSTITUANTE. 6

Après l'acceptation de la constitution, on s’OCCUpa de former la maison du roi; on n'osa pas former la

du roi avec malpropreté, jetant les os de volailles par la portière, au risque de les envoyer jusque sur le visage du roi; haussant son verre, sans dire un mot, quand Madame Elisabeth lui versait du vin, pour indiquer qu'il en avait assez... Pressé par la reine de prendre quelque chose, Barnave lui répondit : « Madame, les députés de l’Assemblée nationale, dans une circonstance aussi solennelle, ne doivent occuper Vos Majestés que de leur mission et nullement de leurs besoins. » La reine lui demanda quels moyens il lui aurait conseillés : « La popularité, Madame, — Et comment pouvais-je en avoir, elle m'était enlevée? — Ah! Madame, il vous était bien plus facile de la reconquérir qu'à moi de l'obtenir. »

Le roi avait commencé à parler à Pétion sur la situation de la France et sur les motifs de sa conduite, fondée sur la nécessité de donner au pouvoir exécutif la force nécessaire, puisque la France ne pouvait être république : « Pas encore, à la vérité, répondit Pétion, parce que les Français ne sont pas assez mürs pour cela. » Cette audacieuse et cruelle réponse imposa silence au roi qui ne parla plus jusqu’à son arrivée à Paris. Pétion tenait sur ses genoux le dauphin ; il se plaisait à rouler sur ses doigts les beaux cheveux blonds de l'enfant et, parlant avec action, il tirait ses boucles assez fort pour le faire crier. « Donnez-moi mon fils, dit la reine, il est accoutumé à des soins, à des égards, qui le disposent peu à tant de familiarités.. »

« Nous tenons encore les fils qui font mouvoir cette masse populaire,» dit quelque temps après Barnave à’M. de Jarjayes,' en lui montrant un gros volume sur lequel étaient enregistrés les noms de tous les gens que l’on faisait agir à volonté par la seule puissance de l'or. Il était en ce moment question d'en payer un nombre considérable pour s’assurer d'acclamations bien prononcées lorsque le roi et sa famille reparaîtraient au spectacle à l’époque de l'acceptalion de la Constitution ( Mémoires de madame Campan, t. Il, p. 151 et suiv.).