Orateurs et tribuns 1789-1794

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maison civile. « Comment voulez-vous, Madame, écrivait Barnave à la reine, parvenir à donner le moindre doute à ces gens-ci sur vos sentiments? Lorsqu'ils vous décrètent une maison militaire et une maison civile, semblable au jeune Achille parmi les filles de Lycomède, vous saisissez avec empressement le sabre pour dédaigner de simples ornements. » La reine persista : « Si cette maison constitutionnelle était formée, il ne resterait pas un noble près de nous, dit-elle, et quand les choses changeraient, il faudrait congédier les gens que nous aurions admis à leur place. »

Il sacrifie sa popularité, s'efforce de sauver l’inviolabilité royale, de relever les débris du trône en les cimentant d'institufions libérales, et, dans un de ses plus beaux discours, retourne l'accusation de servilité contre ceux-là mêmes qui réclament la déchéance de Louis XVI : « Vous allez jusqu’au délire du courroux parce que l’homime-roi a fait une faute; vous seriez donc comme des esclaves prosternés à ses pieds s’il avait flatté vos goûts ? Et voyez le danger d’une pareille disposition, car la nation française sait bien mieux aimer qu'elle ne sait haïr. » Et encore : « Vous n’avez pas senti que si, par l'effet d’une passion, la nation pouvait détruire la royauté, elle pourrait, par une autre passion, détruire la République pour établir la tyrannie. » Presque seul, il combat le découragement, l’intrigue et l'anarchie toujours croissants, trouve des mots dignes de Mirabeau : « 11 ne suffit pas de vouloir être