Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA CONSTITUANTE. 71

« Nous avons remué la terre bien profond, nous avons trouvé un sol fécond et nouveau, mais combien en estil sorti d’exhalaisons corrompues! Combien d'esprit dans les individus, combien de courage dans les masses, mais combien peu de caractère réel, de force calme et surtout de véritable vertu !.…. Le parti modéré a toujours Jàchement abandonné ses chefs, tandis que le parti aristocratique ou populaire a toujours vaillamment soutenu les siens. Tout ce qu’on peut en attendre, en général, ce sont des vœux secrets et quelques applaudissements lorsqu'on à vaincu pour lui, un faible appui dans le succès, nulles ressources dans la défaite, aucun espoir de vengeance. Dans cette révolution, il n’y a jamais eu d'énergie, d'ensemble et de talent que pour l'attaque. »

Arrêté le 49 août 92, Barnave reste pendant plus de quinze mois enfermé, à Grenoble d’abord, puis au fort Barraux, d’où il aurait pu s'évader sans peine ; il résiste aux instances de ses amis. Un jour même que le jeune réquisitionnaire chargé de le garder s’endormit, il le réveilla : « Tu dors, et si je m'échappais, que deviendrais-tu? » Le 3 novembre 1793, on le transféra à Paris. Danton lui fait savoir qu'il sera libre s’il écrit à la Convention; il refuse: « Leur demander justice, ce serait reconnaître la justice de leurs actes antérieurs, et ils ont fait périr le roi. Non, j'aime mieux souffrir et mourir que perdre une nuance de mon caractère moral et politique. » On a rapporté que peu d’instants avant