Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA DROITE. 85

de gouvernement dans la Constituante, ceux qui ont accusé le roi dans la seconde Assemblée étaient écrits. Jamais Vergniaud, Condorcet, Brissot et tant d’autres n'auraient pu dire à la tribune ce qu’ils y ont lu, parce que l'esprit de l'homme n’est pas capable de trouver, en improvisant, cette multitude de tours préparatoires, d’expressions couvertes d’un voile hypocrite, par lesquels ils amenaient insensiblement l’Assemblée à entendre les propos les plus violents. Déjà, bien auparavant, Dumont de Genève avait remarqué qu’une grande partie des travaux qui se produisaient à la tribune était manufacturée au dehors, qu’on ne se faisait aucun scrupule de débiter un discours qu'on n'avait pas composé, de s’honorer de celte espèce d’imposture publique. Le préjugé persiste encore sous la Restauration et beaucoup de députés se plaignent que Vaublane « ne les ait pas jugés dignes d'entendre un discours écrit ! ».

Il a vu, il raconte les terribles éblouissements de la faiblesse, de la peur, cette passion redoutable, et s’efforce de démontrer qu’ils font toute la force des factieux,

1. On ne lit presque plus aujourd'hui et, depuis la Révolution, de grands progrès ont été réalisés dans cet art de la parole qui est aussi une science et un don. Nous avons, de 1870 à 1890, entendu bien des discours qui peuvent être comparés à ceux des plus puissants orateurs de la Restauration et de la monarchie de Juillet il suffit de citer, parmi les maîtres de la tribune: MM. Bocher, Buffet, duc de Broglie, duc d’Audiffret-Pasquier, Chesnelong, de Mun, Gambetta, Challemel-Lacour, Ribot, Jules Simon, de Freycinet, Léon Say, Clémenceau, etc.