Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA DROITE. 87

dans une assemblée, on reste le maître de parler ou de se taire, de cacher sa faiblesse sous le voile du vote secret.

L'auteur des Mémorres fait son procès en règle à l'opinion publique, où plulôt à ces cent opinions publiques qu'il A vues depuis quarante ans paraître et disparaître comme des feux follets. « On la nomme la reine du monde, observait Voltaire, elle mérite ce nom; car, toutes les fois que la raison se présente pour la combattre, la raison est condamnée à mort. » Cest l'opinion publique qui proscrivait les bicaméristes, qui envoyait à la guillotine les suspects, qui propageait les erreurs funestes et aussi les vérités utiles; et n'y avait-il pas em même temps plusieurs opinions publiques, celle des faubourgs et celle des bourgeois, celle des constitutionnels et celle des Jacobins, celle de Paris et celle de la province, et, de tout temps, chaque parti n’a-t-il pas prétendu avoir le dépôt, le monopole de l'opinion publique ? Les anciens la représentaient sous les traits d’une jeune femme à la démarche et à la contenance mal assurées, au regard très hardi; le Tasse la définit de la sorte : « C’est la mobilité, l'instabilité ; elle change à l'infini... la prévention, l'entétement, le caprice, le mensonge, la frivolité sont les fidèles ministres de ses volontés. » Et Pascal conclut dans son style inimitable : « Cette maîtresse d'erreur, que l’on appelle fantaisie et opinion, est d'autant plus fourbe, qu’elle ne l'est pas toujours, car elle serait règle infaillible de la