Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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le Brisgau vers le milieu de mars 1798, et, après une excursion à Tubingen où Suart s'était fixé auprès de M. de Narbonne, il gagna le Holstein, en passant par Darmstadt, Francfort, Hanovre et Hambourg. Il arriva, au commencement d'avril, à Tremsbüttel, chez le comte Christian de Stolberg où il était attendu, et s'établit, dès les premiers jours de mai, à Emckendorff. Il ne devait plus s’en éloigner que pour rentrer en France.

Portalis et son fils ont tracé, dans leur correspondance intime avec Me Portalis, demeurée à Paris pour y défendre les intérêts de ses chers exilés, un tableau touchant de leur vie à Emckendorff. Un climat tempéré par le voisinage de la mer, une campagne riche et verdoyante, dont la monotonie septentrionale n'excluait pas un certain charme mélancolique, la douceur des habitants, le spectacle de leurs mœurs patriarcales, tout y respirait le calme et la paix, tout portait au recueillement, tout y invitait l’Ame à ces méditations profondes et voisines de la rêverie qui sont si familières aux peuples du Nord et que l’aspect de leur pays suffit à expliquer.

Une société choisie se réunissait à Emckendorff. L'Allemagne était alors dans toute la ferveur de ce grand mouvement intellectuel dont Mme de Staël a tracé un si admirable tableau. Excité par nos exemples, instruit par nos erreurs, aiguisé, assoupli par le contact incessant des émigrés, le génie allemand sortait deson long sommeil et préludait , en créant une grande littérature nationale, à la fondation plus ou moins