Portalis : sa vie, et ses oeuvres

EN EXIL 1e éloignée de son unité politique. Histoire, philosophie, critique, art dramatique, épopée, il abordaït tous les genres avec une merveilleuse puissance et y laissait son empreinte, moins brillante, maissouvent plus profonde que celle de l’école française du xvnr siècle. Klopstock rendait à la poésie épique la vigueur de pensée et la simplicité d'expression qu’elle avait perdues depuis l'antiquité ; Schiller substituait à la froide solennitéde la tragédie voltairienne les drames vivants, le langage énergique et simple du Moyen Age, et, en même temps, il donnait à l’histoire le relief et le coloris du drame; Kant portait ses investigations hardies dans les régions de la pensée pure ; Goethe enfin, génie universel, avait quelquefois toute la vivacité légère et charmante de Voltaire, sans perdre jamais entièrement l'accent rêveur et grave de la poésie germanique. Faust, Wallenstein, l’Iistoire de la guerre de Trente ans, la Critique de la raison pure venaient de paraître, et ces œuvres admirables, qui marquent l’une des grandes phases de l’histoire de l'esprit humain, passionnaient l'Allemagne plus que les guerres et les révolutions. Les cours des petits princes confédérés, les châteaux de la noblesse étaient devenus autant de foyers d’érudition et de littérature où les auteurs en renom étaient les vrais souverains, et où l’on discutait doucement et doctement sur les règles de l’art et les principes de la philosophie, pendant que la France renversait des trônes etabattait des têtes royales.

Emckendorff était, comme on eût dit alors, un de ces asiles consacrés aux Muses. Voss et Niebuhr en étaient 8