Portalis : sa vie, et ses oeuvres

EN EXIL 125

pue Je vous parle sur tout cela avec d'autant plus

» de franchise que je dois aux circonstances d’être plus » désintéressé. Je ne dis point la sagesse, mais le » hasard du moins à fait que je n’ai appartenu à au» cun parti et qu’en conséquence j'ai toujours été mieux placé pour bien voir et bien juger; je n’ai » point émigré et je n’ai jamais approuvé l’émigration, parce que j'ai toujours cru qu’il était absurde de quitter la France dans l'espoir de la sauver et de se » mettre dans la servitude des étrangers pour prévenir

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ou pour terminer une querelle nationale. D’autre » part, je n'ai pas voulu me mêler des changements et des réformes projetés par les premiers révolution >» naires, parce que je me suis aperçu qu’on voulait former un nouveau ciel et une nouvelle terre et

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» qu'on avait l'ambition de faire un peuple de philosophes lorsqu'on n’eût dû s'occuper qu'à faire un » peuple d’heureux. J’ai vécu dans la solitude et dans les cachots; j'ai dit alors et je dis encore : Obhiviscor » 608 obliviscendus et illis. Mais je ne suis pas devenu

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injuste ; les sujets qui se sont montrés plus fidèles ne doivent point mépriser ceux qui n’ont pas suivi

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» les mêmes voies : je.ne parle pas de ceux d’entre » eux qui, vivant des abus, n’avaient aucun intérêt à » les réformer, mais de ceux même qui ont été fidèles » par devoir et par principes, je leur dirai : voulez-vous » être utiles, soyez indulgents : le gros des hommes » n’est jamais avant l'expérience ce qu'il ne peut de» venir que par elle. Tous les hommes ont des passions, ils n’ont pas le droit de se plaindre de celles

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