Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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extrêmes en philosophie comme en toutes choses, il cherche à se maintenir également éloigné de l’idéalisme et du sensualisme ; il aime ce rôle de conciliateur, qui expose toujours à l’animadversion des divers partis en présence, mais qui est le plus souvent conforme à la raison et à la vérité. Dès le début de son ouvrage, sur la question capitale de l'origine des idées, qui est presque à elle seule toute la philosophie, il prend nettement position entre les deux solutions radicales. Il n’admet, d’une manière absolue, ni la théorie des idées innées, ni celle des idées acquises. Il croit à la préexistence de l’élément intellectuel dans l’homme, il considère comme inhérentes à notre nature les idées fondamentales de cause, de substance, de temps, d’espace, la notion du juste et de l’injuste, et cet indispensable principe de contradiction, qui sert, pour ainsi dire, de boussole à notre entendement ; mais les idées particulières ne sont, à ses yeux, que des idées acquises, et les idées générales elles-mêmes, quand elles ne tiennent pas à la substance de l'être pensant, doivent être considérées uniquement comme les résultats logiques des idées particulières que nous tenons de l’expérience. Partant de cette distinction essentielle, il réfaute, les uns par les autres, les idéalistes allemands et les sensualistes français du dernier siècle.

Son premier adversaire est Kant, dont le nom, alors inconnu en France, remplissait déjà l’Allemagne ; il démontre combien ce grand philosophe, qui s'annonce comme médiateur, est, en réalité, dogmatique et ex clusif. I le loue sans doute d’avoir réagi contre l’in-