Portalis : sa vie, et ses oeuvres

EN EXIL 137

, éclairent la terre et vivifient la nature entière. » Conçoit-on que le matérialisme puisse se refuser à » cet ensemble de choses ? Qu'il puisse regarder comme » de pures machines des êtres qui ont créé la mé» canique et expliqué le mécanisme de l’univers®? Conçoit-on qu'au mépris de l'expérience, au mépris de tout ce qu’il sent, de tout ce qw’il voit, de tout ce + qu'il entend, de tout ce qu’il pratique, au mépris de la langue qu'il parle, et dont chaque expression le » dément, il puisse méconnaître l’homme dansl’homme et ne fonder sa propre existence que sur le désaveu perpétuel de lui-même 1? » Cette belle page clôt la partie purement métaphysique de l’ouvrage de Portalis. Sa théorie morale repose sur les mêmes bases et s’inspire du même esprit; elle exclut l’exagération dans tous les sens. L’hypothèse d’une morale indépendante, si vivement controversée de nos jours, se rencontre déjà sous sa plume et il la discute avec autant de pénétration que d’impartialité. Il n’admet pas que la morale soit seulement une partie de la religion ; il la considère comme indépendante, en ce sens que les grandes lois morales observées par tous les peuples ne changent pas avec les variétés si nombreuses de dogmes et de pratiques religieuses qui se partagent le monde; mais, d’un antre côté, il refuse absolument de croire que l’idée morale se suflise à elle-même et qu’elle puisse conserver quelque force là où s’est éteint le sentiment religieux. Indépen-

Y

Y

ÿ

Y

1. Portalis, loco citato, tome ler, chapitre 1x, page 471.