Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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dante du culte, la morale est, suivant Portalis, dépendante de Dieu ; l'existence de Dieu peut seule lui donner autorité et lui assurer une sanction. En dehors de Dieu, elle ne serait plus que l’œuvre de l’homme, de ses passions où de ses préjugés; imparfaite et changeante comme tout ce quiest humain, elle n’obtiendrait plus ni soumission ni respect. En dehors de Dieu, elle serait désarmée : sa violation demeurerait impunie, et, contre la force triomphante, l'innocence opprimée m’aurait plus de refuge ici-bas, plus de réparation audelà du tombeau. Il faut être logique : nier la distinction du bien et du mal ou affirmer l’existence de Dieu. Sur ce point essentiel, la pensée de Portalis est claire, et ce serait bien à tort que les coryphées con temporains de la morale indépendante prétendraient le ranger parmi leurs alliés. Il déplore comme eux le long oubli où la science moderne a laissé l'étude des lois morales si vivement discutées par les philosophes de l'antiquité, et il insiste sur l’absolue nécessité de ne pas abandonner sans guide moral les hommes auxquels manque la foi religieuse ; mais, en cette occasion comme en beaucoup d’autres, la philosophie du xvirr siècle lui paraît avoir dépassé le but et jeté l’esprit humain . d’une exagéralion fâcheuse dans un excès plus dangereux encore. Il n’admet pas que la morale soit fille de l'intérêt ; il nie qu’elle soit née uniquement de notre raison ; il se refuse à ne voir en elle, avec La Mettrie, que le résultat de l'éducation et de l’habitude. À ses yeux, pour assurer à la morale quelque certitude, c’est an-dessus de nous qu’il importe d’en chercher