Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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» l’homme avec Dieu. Malgré ses relations multipliées avec ses semblables, l’homme est seul quand il pense, seul quand il désire, quandildélibère, quand il veut, » et souvent même quand il agit : il est seul quand il » souffre, il est seul quand il meurt. Que deviendrait » l'âme humaine, abandonnée à cette solitude pro» fonde, si elle n’en était arrachée par la grande idée » de l’existence de Dieu, idée vaste et pénétrante, qui, » dans tous les instants de notre existence, nous offre

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» à la fois un législateur, un modèle, un témoin, un » consolateur, un juge? Aussi l’histoire de tous les » peuples constate que la religion est d’instinet comme » la sociabilité... Si la philosophie veut être utile à la » morale, elle ne doit donc point se séparer de la reli» gion, ni mépriser la lumière du sentiment. Le vrai » ministère de la philosophie est de devenir, par ses » maximes et par ses préceptes, la mémoire du cœur, » et d'empêcher, en donnant des idées exactes de la » Divinité, que l’on n’abuse de la religion. »

Sur cette question encore, Portalis cherche à réagir contre toutes les exagérations. Il combat d’abord les systèmes athées du xvrr° siècle : il démontre qu'en refusant d'admettre l’existence de Dieu parce que Dieu ne tombe pas sous nos sens, La Metirie est en contradiction avec la science elle-même, qui si souvent affirme par induction ce qu’elle ne voit pas. Il fait ressortir l’inconséquence de la doctrine qui substitue à Dieu la nature, mot vague et indéfini, qui ne peut désigner

1. Portalis, De l’usage et de l'abus de l'esprit philosophique, tome II, chapitre xx, pages 99 et 105.