Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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que toutes les religions confessent en l’adorant; il n’est plus qu'un pur concept, une idée reléguée, comme on l'a dit, dans l’immensité solitaire d’une éternité silencieuse. Né de nôtre intelligence et sorti de notre âme, il n’a pas de substance propre, de personnalité, d’action; ilest, mais ilne vit pas, son existence dépend de celle de l’homme *.

Or, voici la réponse, telle qu’elle se dégage de l’observation psychologique et morale : il est un Dieu, Dieu personnel et vivant, Dieu unique, éternel, infini.

Ce Dieu vivant existe; car, sans lui, la nature humainene serait pas explicable. Tous, en effet, nous portons au fond du cœur un idéal; tous, nous nous élevons, par la pensée, au-dessus de cette terre, nous pénétrons au delà du monde visible; notre âme possède l’idée de l'infini, de l'éternité, de la perfection. D’où viennent donc à l’homme ces grandes idées, tour à tour son supplice et sa joie? De lui-même? Non; car, à chaque moment de sa vie, ilse sent fini, limité dans l’espace et dans la durée; il se sait imparfait et il le proclame. L'idée d’imperfection est, cependant, une idée essentiellement relative: l’imparfait suppose le parfait, comme le fini suppose l’infini, et l’infini ne naît pas plus du fini que letout de la partie. L’infini et la perfection ne sont done pas nés de l’homme: néanmoins, ils existent, puisque l’homme les conçoit et que l’on ne

A. Cette erreur est aujourd’hui plus vivace que jamais : « Dieu » n’est que le suprême idéal... Point d'humanité, point de pensée, » point de Dieu. » (Vacherot, la Métaphysique et la science, tome IT, page 584.)