Portalis : sa vie, et ses oeuvres

146 PORTALIS

pas à le poursuivre, et, en traçant leur sillon souvent arrosé de larmes, ils répètent ces mélancoliques accenis d'un grand poëte :

Cause see... Medio de fonte leporum » Surgit amari aliquid, quod in ipsis floribus angit. »

De telles idées ne sont pasle fruit de l'esprit humain qu’elles accablent et qu'elles plongent dans l’angoisse. Elles existent done en dehors de lui, au-dessus de lui ; elles le saisissent, pour ainsi dire, malgré lui. Elles sont, par conséquent, éternelles et vivantes; mais qu'est-ce qu'une pensée vivante, sinon un être? Et l'être éternellement vivant, en qui se résume et se consomme tout art et tout amour, de quel nom l’appeler, si ce n’est Dieu ?

Dieu existe, car l’homme le découvre et le sent au fond de lui-même dans le sanctuaire de la conscience. D'où vient, en effet, le remords? Les philosophes sceptiques diront-ils encore de la conscience ce qu'ils disent de Dieu? La considéreront-ils comme une conception de notre intelligence, comme une pure imagination de notre esprit? La simple réflexion suffit pour faire sentir linanité d’une pareille explication. Alors même que nous admettrions que l’homme, altéré de bonheur, prend pour des réalités de consolantes fictions, nous ne pourrions pas SUpposer qu’il crée et perpétue son propre supplice, et le plus eruel de tous les supplices. Le même cœur qui a froidement résolu le crime ne donnera pas naissance au remords. Le remords est le cri de la vertu violée, la suprême vengeance de la justice ouira-