Portalis : sa vie, et ses oeuvres

LE CONCORDAT 293

être encore assez puissante pour mettre un terme aux tyrannies locales ; le monde ancien s ’abimait dans des convulsions sanglantes et le monde nouveau ne faisait pressentir que par des déchirements et des révoltes son lointain avénement. Jamais la force brutale n'avait commis de si grands attentats, jamais elle n'avait mêlé tant de perfidie à tant de cruautés ; toutes les faiblesses que le Christ avait protégées, toutes les misères qu'il avait bénies étaient de nouveau opprimées et foulées aux pieds: l’esclavage avait reparu, avec ses horreurs, sous le nom de servage ; le pauvre était devenu le jouet avili et torturé de la puissance ; la femme était, comme aux temps de la Rome païenne, la proie de la volupté, et l’adultère, assis sur le trône, y prétendait à la légitimité. Contre de tels excès, les victimes n’avaient d’autre sauvegarde que l’autorité de l'Église: c’est à elle que l’esclave, le paysan, le pauvre, la femme demandaient secours et consolation, et l’histoire impartiale nous les montre tendant sans cesse vers Rome leurs bras suppliants. Seule, en effet, l'Église conservait, au fond des monastères du Moyen-Age, le dépôt sacré de la science, du travail et de la charité; seule elle pouvait panser les plaies, rasséréner les âmes des malheureux, et sa cause était celle de l'humanité. Un jour arriva où le pouvoir temporel, escorté de ses hommes d’armes et de ses légistes, vint frapper aux portes du sanctuaire et prétendit substituer un clergé de son choix à celui dont les censures l’importunaient: la guerre éclata sanglante, acharnée, elle se prolongea pendant des siècles, et, lorsqu’au plus fort de la lutte, la Papauté se vit