Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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par une abdication coupable de ses droits où par une complaisance intéressée ; ils invoquent, à l’appui de leur thèse, le principe de la liberté de conscience, le dogme de la souveraineté absolue de l'État, ils proclament la séparation éternelle du glaive spirituel et du glaive temporel, et, formulant leur théorie en axiome, ils décrètent l'Église libre dans P État libre. , Ces deux erreurs, en apparence ennemies, Sont sœurs en réalité. Pour en démêler le germe, il suffit de rappeler l'origine respective de l'État et de l'Église, et d’en déduire, comme conséquences, leurs missions respectives, leurs devoirs réciproques. L'État est fils de l’homme : né de notre instinct de sociabilité, formé à l’image de la famille et de la commune, il est créé pour faciliter à chacun le libre exercice de ses droits naturels, la satisfaction légitime deses besoins, et pour imposer à chaque citoyen, au nom de tous, les règles salutaires d’où dérivent la paix et la sécurité du corps social, L'Église est fille de Dieu : sortie de son sein, émanée de sa volonté créatrice, mais propagée par des hommes, maintenue en général par des moyens humains, elle a, comme Dieu lui-même, pour lui et en son nom, l'empire des consciences et des âmes ; son royaume est celui du ciel, sa loi est La Loi morale ; son but est la sanctification de l'humanité.

De là, une double conséquence, un double devoir, un double droit, L'État, chargé de pourvoir aux besoins légitimes des hommes qui le composent, ne peut, Sans faillir à sa mission, comprimer ou seulement négliger le plus universel, le plus durable, le plus élevé de tous,