Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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peu de jours après en discussion, Portalis partageait l’opinioh constante et presque unanime de la magistrature : il demandait que la contrainte par corps, imprudemment supprimée par la Convention, fût rétablie en matière commerciale. Le principe de la liberté individuelle, invoqué. alors comme aujourd’hui par les partisans de la suppression, ne lui paraissait pas en question. Il refusait d'admettre qu’une voie d’exécution qui n’a rien d’arbitraire, dont la loi règle l’application, le degré de rigueur et la durée, et à laquelle l’emprunteur se soumet d'avance et sciemment par le fait de Pemprunt, portât la plus légère atteinte à l’indépendance et à l'égalité des citoyens. La loi supérieure de la liberté individuelle ne lui semblait pas plus compromise par la contrainte par corps que par l’emprisonnement pénal.

Cette objection écartée, il trouvait dans la nature et l'importance des opérations commerciales la justification de la contrainte par corps. En effet, comme il le dit avec vérité, l’emprunteur commercial ne possède ou n'engage généralement pas d'immeubles; sa fortune, toujours incertaine et flottante, est, moins que sa personne, la garantie du prêt ; le mouvement constant de ses affaires, la rapidité des transactions, leur inévitable incertitude exposent le prêteur à des pertes fréquentes. En matière commerciale, on prête souvent à des hommes que l’on connaît peu, on prête d’une place sur l’autre, à court terme, et la fortune, l’honneur du préteur, qui est même temps débiteur d’autres commerçants, dépendent presque toujours de l’exactitude