Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3
NATIONALE. 63
» mon existence sans votre permission ; j'ai vengé bien des innocentes victimes ;, j'ai prévenu bien d’autres désastres : le peuple, un jour désabusé , se réjouira d’être délivré d’un tyran: Si j'ai cherché à vous persuader que je passais » en Angleterre, c’est que j'espérais garder l’incognito : mais » j'en ai reconnu l'impossibilité. J'espère que vous ne serez » pas tourmenté; en tout cas, Vous auriez des défenseurs à » Caen. J'ai pris pour défenseur Gustave, Doulcet. Un tel » attentat ne permet nulle défense, c’est pour la forme. » Adieu, mon cher papa : je vous prie de r’oublier, ou plutôt de vous réjouir de mon sort; la cause en est belle. » J'embrasse ma sœur, que j'aime de tout mon Cœur, ainsi » que tous mes parens- N'oubliez pas ce vers de Corneille : « Le crime fait la honte, et non pas l'échafaud. »
« C’est demain, à 8 heures, qujon me juge.
« Le 16 juillet 1793. M. C. Corpay. »
Le lendemain elle fut conduite au supplice, à sept heures du soir. En la voyant, il était plus permis de songer à l'appareil d’ignominie dont elle était entourée. On eût dit une jeune fille qui suit avec modestie, avec sérénité, une fête dont l’objet est de couronner sa vertu. Tout ce peuple qu'elle avait sous les yeux lui semblait affranchi par ses mains.
Quand le fer eut tranché sa vie , le bourreau montra aux spectateurs la tête de Charlotte Corday, et lui donna plusieurs soufilets. Le peuple s’en indigna, et les jacobins euxmêmes firent châtier une férocité que la multitude commit souvent dans les jours de massacre.
® L'exemple de Charlotte Corday apprit à mourir, mais non à chercher la mort.
. La montagne s’occupa de l’apothéose de Marat. Sa hideuse image souilla tous les lieux publics. Il y eut bientôt , dans toutes les villes et dans tous les villages de la France, un lieu consacré, où quelques mottes de terre, couvertes de gazon, figuraient une montagne : un monument y était élevé à Marat, et bientôt Lepelletier fat associé à cette infamie. À toutes les solennités pratiquées par les jacobins , la jeunesse des deux sexes était contrainte , au nom de tous
les supplices qui menacaient leurs pères, de venir jeter des fleurs sur la tombe du monstre qui répéta toujours : Il faut abattre deux cent mille têtes.
La mort de Marat servit de prétexte pour faire arrêter de nouveaux députés, et pour presser la condamnation de ceux qui étaient tombés entre les mains de leurs ennemis.
A peu près vers ce temps ; les chefs de la montagne
imaginèrent de soutenir leur popularité en créant ue
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