Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3
NATIONALE. 215
Déjà les journaux et tous les écrits politiques déc-laient des haînes nouvelles prêtes à éclater. Elles se continrent sans se calmer, lorsqu'on vit une assemblée toute révolutionnaire s'occuper sérieusement d’une constitution. Il n’était aucun parti qui ne sentit ses espérances se ranimer, en pensant que la convention allait finir un règne toujours déplorable et toujours redouté. Elle recut avec beaucoup de déférence, et adopta dans toutes les parties le projet de constitution qui lui fut présenté par Boissy, au nom de la commission chargée de ce travail.
L'assemblée constituante avait voulu donner au pouvoir exécutif l’unité, l’hérédité, mais elle lui refusait la force : la constitution nouvelle le divisait, le rendait électif; mais du moins elle lui donnait de l’action. L'assemblée constituante avait laissé au roi quelques faibles honneurs, qui ne semblaient que les ruines d’une ancienne splendeur; elle les lui faisait acheter par de continuelles entraves. La constitution nouvelle environnait les cinq magistrats qui devaient la mettre en mouvement, de plus d’autorité que d'appareil. La plus fatale erreur de la première et de la plus imposante de nos assemblées politiques était corrigée par la convention. Les représentans de la nation étaient divisés en deux conseils : celui des anciens confirmait ou rejetait les actes du conseil des cinq-cents. Le sytème d’élection posait sur des bases à peu près semblables à celui de la constitution de 913 combinaison pleine de simplicité et de sagesse, si la propriété eût été une condition nécessaire ou pour élire, ou pour être élu ; mais l’excès des inquiétudes républicaines et démocratiques se trouvait dans les fréquens renouvellemens et des directeurs, et des membres du corps législatif: tous les ans, l’un de ces magistrats et le tiers de ces corps étaient remplacés. La nation ne put supporter la crise périodique à laquelle son nouveau code la condamuait: du reste, la constitution de 95 renfermait quelques réglemens sages qui devaient parer aux désordres des assemblées précédentes. Elle ne recut point toutes les vaines adorations dont fut entouré le fragile ouvrage de nos premiers législateurs ; elle ne fut point non plus condamnée avec emportement, avec dédain. Les royalistes mêmes, qui restsient dans leur incrédulité sur l'existence d’une république parmi nous , regardèrent cette constitution comme une transition supportable à un ordre de choses que la nécessité leur paraissait devoir amener.
Mais les espérances avouées par la sagesse, et celles qui étaient suggérées par l'esprit de parti, furent bien décues: quand on apprit le dessein formé par la convention natio-