Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

EXECUTIF. Gr

tout-à-coup les assassins s’arrêtèrent , et que, songeant à ces canons chargés à mitraille qui avaient vomi leurs feux sur leurs parens, sur leurs amis, ils voulurent faire éprouver ce même genre de mort aux prisonniers livrés à leur vengeance ; qu’un canon fut tiré dans la cour intérieure des prisons; que, par les soupiraux, on jeta des paquets de soufre à l'entrée des souterrains où ils étaient entassés. Voici une circonstance qu’on ajoute, et plus propre encore que toute autre à faire détester ces représailles de massacres. Quelques femmes avaient voulu suivre leurs maris dans cette fatale prison , elles périrent avec eux. Un fils ÿ avait suivi son père, ils furent frappés ensemble.

Bientôt dans ces contrées, mais particulièrement dans les départemens du Var, de Vaucluse, du Rhône et des Bouches-du-Rhône, il se forma des associations secrètes, telles qu'il en exista en Italie dans le temps des Guelfes et des Gibelins : ce fut un art que d’assassiner. On apprit à lancer le stylet avec dextérité. Les ruines de Lyon furent fatales à ceux qui les avaient entassées, et peut-être aussi souvent fatales à des hommes qui avaient encouru des haînes particulières, sans avoir mérité la haîne publique. L'homme vindicatif et timide soudoya l'assassin qui était revenu impuni et presque triomphant des massacres du fort Saint-Jean de Marseille. Il y eut des suspects de terrorisme qui furent condamnés et frappés par un tribunal invisible. On prétend que l’une de ces associations s'appelait /z Compagnie de Jésus. Rien n’est moins constant que cette invocation sacrilége faite par des homicides ; mais, soit sous ce titre, soit sous celui de Compagnie du Soleil, ou sous tout autre, il y eut une correspondance entre des hommes qui, dans plusieurs lieux, et presque chaque nuit, traînaient dans le Rhône les cadavres des victimes qu’ils frappaient dans ombre. Des fonds étaient établis pour ces sociétés, qui avaient leurs chefs, leur discipline, leurs registres. Le directoire ne cessa de montrer une profonde horreur pour ces assassinats ; ils durèrent presque aussi long-temps que son règne. Souvent il se plaignit, et ce fut avec justice, des entraves que lui opposaient les formes constitutionnelles pour en arrêter le cours. Les jurés tremblèrent toujours à l’aspect de ces hommes qui paraissaient exercer un pouvoir plus prompt et plus redoutable que le leur. ? EL

Ce fat à Lyon, à Marseille, à Toulon, à Aix, à Arles, à Orange, à Avignon, à Sistergn , à Tarascon, que les assassinats se renouvelèrent Le plus fréquemment. On dit qu’à Sisteron un homme fut enterré tout vivant, et, par une barbarie qu’on a peine à croire, porté ensuite sur une

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