Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

EXECUTIF. 111

dern et à Heil, qui laissent libre la retraite sur Huningue, L'armée se porte vers la tête du pont, et, le 5 brumaire, à la vue des ennemis, que la terreur et le respect tiennent immobiles , elle passe majestueusement le Rhin.

Bientôt l’archiduc se présente avec toute son armée devant Kell. Nous avous vu ce fort emporté dans une matinée par une poignée de Français qui s'étaient élancés de l'autre rive du Rhin. Ils y avaient construit à la hâte quelques ouvrages de terre : gènés par un corps de troupes que l’archiduc avait laissé pour en faire le blocus, il n'avaient pa que faiblement étendre leurs lignes de fortifications. Mais ils étaient maîtres du pont de Strasbourg; ils pouvaient à leur gré renouveler la garnison de Kell. Ils avaient élévé des redontes sur les îles du Rhin, qui leur avaient à eux-mêmes facilité cette conquête. L’archidue semblait rougsir d’avoir recours aux travaux d’un siége pour une telle bicoque. Il sy détermine après un inutile bombardement. Aux efforts qu’il fait, vous diriez qu’il s'agit de Mayence, de Luxembourg, ou de Mantoue. Le général Desaix , chargé de la. défense du fort, renverse, dans des sorties victorieuses , des ouvrages mal commencés, les couvre des cadavres des ennemis. Le pont de Strasbours est enfin rompu. On le répare. Il tombe en éclats une seconde fois. Moreau ne peut plus donner les mêmes secours au fort assiégé. La seconde parallèle est déjà achevée. Desaix se défend encore : il ne veut rendre qu’un monceau de cendres. Le 21 nivôse, après soixante-quinze jours de tranchée ouverte, l’archiduc Gharles se rend maître d’une chétive bourgade devant laquelle il a perdu quinze mille hommes. Le général Desaix conserva, par une capitulaion digne d’une telle défense, toute son artillerie, et'il repassa le Rhin avec sa garnison, tambour battant, mèche allumée et drapeaux déployés. La même capitulation ent lieu pour l'abandon de la tête du pont d'Huningue. L’autriche demanda un nouvel armistice sur le Rhin. Il lui fut accordé; mais la possession de la rive gauche du fleuve laissée aux Français était encore une belle récompense des puissans efforts de l’armée du Rhin et de celle de Sambre et Meuse,

Ainsi finissait la campagne la plus brillante qui eût encore signalé les armées françaises. La république, par cet élan de courage , humiliait quatorze siècles de monarchie. La campagne de 1794 pouvait seul entrer en parallèle avec celle de 1796; mais, dans la première , le courage des combattans perdait de son prix quand on songeait à leur innombrable multitude; ce n’était point seulement la puissance