Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

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ner. Ce parti entretenait par ces imprudentes tentatives l'inquiétude générale, et s'exposait à une surveillance active de la part de ceux qu'il prétendait écraser. Un soir on apprit que les englués s'étaient réunis en armes dans la maison du dépôt de sel, rue du Temple, au cercle des Français, et qu’ils allaient tenter un coup de main. À peine cette nouvelle se répandit-elle, que les citoyens révolutionnaires de St.-Gervais et des quartiers voisins accoururent en armes et vinrent se poster près de la fontaine du bas de Coutance, pendant que d’autres tournaient la rue du Temple en passant par celle des CorpsSaints ; la lutte ne tarda pas à s'engager, des coups de fusils furent échangés, et il y eut de part et d'autre quelques blessés. Gay, du parti des révolutionnaires , étant tombé frappé d’un coup de feu à la cuisse qu'avait tiré sur lui Baudit-Vallis, l'un des chefs des englués que nous avons vu figurer dans l'affaire des Barrières, eut le courage de se relever et de riposter par un coup de fusil qui étendit Baudit-Vallis sur le carreau. Sa mort porta la consternation dans son parti qui se retira en désordre. Le cri d'alarme et le tocsin retentirent encore cette fois dans la cité.

Une émeute de celte nature dans tout autre moment eût été on ne peut plus fâcheuse, dans l’état des choses elle produisit d’heureux résultats. Tous les citoyens étaient las de vivre dans des troubles incessants, de voir l'industrie et le commerce paralysés, et surtout d’avoir à redouter constamment, ou une révolution, ou une réaction, c’est-à-dire le triomphe d’un des partis extrèmes. Les indifférents s’agitèrent des premiers dès qu'ils purent penser que le danger était passé; les organes ordinaires