Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

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propos atroces qui se tenaient, la manière dont la générale fut arrêtée, et la férocité avec laquelle le citoyen syndic Delor fut repoussé dans l’intérieur de la Maisonde-Ville par les gens armés qui l'investissaient, tout annonçait les résultats les plus sinistres; et lorsque je n'en jugerais que par la rage bien connue qu’elle fit naître dans le cœur de quelques-uns, je le dis encore avec plaisir, la présence du Résinenr sauva la République.

Je ne sais si ce fut un jeu de mon imagination ou si c’était la réalité; mais je crus voir depuis ce moment les hommes, pour lesquels faire le mal est un besoin, s’en prendre à moi plus particulièrement qu'à mes autres collègues, pour m’accabler de tous les bruits que la calomnie la plus noire peut enfanter : je vis des citoyens qui naguère étaient venus auprès de moi chanter la palinodie, et me dénoncer les infàmes dont ils convenaient avoir été les vils instruments, me lancer, lorsqu'ils me rencontraient, des regards de proscription, et tous les rapports qui m'étaient faits confirmaient mes conjectures. Un trèszélé patriote me dit confidentiellement un jour: Mais pour le nom de Dieu, dites-le-moi, je vous en prie, citoyen syndic, que pouvez-vous avoir fait à ces gens-là pour qu'ils soient si furieux contre vous ? Je les vois, je les entends {ous les jours, ils en veulent beaucoup aux syndics en général ; mais quand ils tombent sur votre compte! rien m'égale leur fureur; on dirait, à les entendre, que nous leur avez fait tout le mal imaginable. Ha! si jamais il arrive quelque chose (et je vous le dis, cela ne tardera pas), prenez garde à VOUS; CEUX qui vous approchent et qui s'efforcent de vous faire bonne mine, sont les plus furieuæ et les plus déterininés à ne pas vous laisser échapper.