Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

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Agram et se rendit dans un monastère serbe de la Dalmatie auquel était annexée une école. Il y enseigna pendant trois ans, rétribué le plus souvent en nature (froment, huile, fromage). Il apprit un peu d’italien, réalisa quelques économies qui lui permirent d'entreprendre de nouveaux voyages. Il était en route pour le Mont-Athos quand il fut retenu par la maladie dans un monastère du Monténégro, non loin de Cattaro. Il y fut ordonné prètre le 1r avril 1764. Au cours de l’année suivante nous le trouvons à Kosovo, non loin de Knin. C’est là qu’il commença à écrire dans sa langue maternelle, le serbe vulgaire. Il traduisit pour la fille d’un de ses confrères quelques sermons de saint Jean Chrysostome.

C'était la première fois qu’on avait l’occasion de lire les textes sacrés dans la langue populaire. L'innovation eut un grand succès et de nombreuses copies du manuscrit circulèrent dans les régions environnantes. Étonné et charmé de ce résultat qu'il n'avait pas prévu, Dosithée se résolut à écrire dans cette langue populaire jusqu'alors si négligée. Il passa trois année fort heureuses en Dalmatie. Plus tard, lorsqu'il lut Télémaque et qu’il y trouva la description des félicités de la vie rustique, il se plaisait à l’appliquer au souvenir de son séjour dans cette province.

Il poussa aussi en Bosnie, où il eut occasion d’exercer parmi les Serbes orthodoxes les fonctions de son ministère et de recevoir notamment les fidèles en confession. Il fait un éloge enthousiaste de ses pénitents :

On ne peut voir nulle part des gens aussi bons. Ils n'avaient aucun péché à me raconter, sauf qu'ils avaient parfois, le mer_credi et le vendredi, — jours de maigre, — mangé une écrevisse ou des haricots à l'huile, ou qu'ils avaient juré après dés chèvres égarées. Parmi ces saints pécheurs, je passai le carême et célébrai la Pâque. Ensuite je gagnai Trogir (Trau), puis Spalato etje m'embarquai pour Corfou.

Sur la tartane qui l'emporte, le voyageur n’a pour compagnons de route que des Grecs, etil ne peut communiquer