Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

LA RENAISSANCE INTELLECTUELLE DE LA NATION SERBE 97

avec eux que grâce au peu d'italien qu’il a appris en Dalmatie. Il s'étonne de la rapidité avec laquelle ils parlent entre eux : « Jamais je ne pourrai apprendre une pareille langue ; c’est menu, menu au delà de tout ce qu'on peut imaginer... Je me demandais comment ils se comprenaient entre eux. »

Il devait pourtant l’apprendre, cette langue mystérieuse, ainsi que nous le verrons plus loin. Il prit ses premières lecons dès son arrivée à Corfou.

Il gagne Nauplie et de Nauplie le Mont-Athos, où il passe l'automne et l’hiver de l’année 1765. Il ne rencontre point dans ce sanctuaire la vie idéale qu’il avait rêvée. Les moines serbes et bulgares passent leur temps à se disputer le monastère. Du Mont-Athos il se rend à Smyrne où il trouve une généreuse hospitalité dans un couvent hellénique et en une année il fait de tel progrès en langue grecque qu'il est en état de lire les classiques. Il se loue en termes enthousiastes de l’hospitalité smyrniote et porte aux nues la science de son maitre, le prêtre Hiérothée, « un homme divin, un nouveau Socrate ». u

Il résida trois ans à Smyrne et en conserva un excellent souvenir. Il l'appelle « sa chère ville dorée, une ville où il a cueilli des fleurs qui ont parfumé sa vie et son cœur, où il a sucé le lait de l’éloquence attique et savouré le miel de la poésie homérique ». Dans ce temps-là Slaves et Grecs n'étaient pas encore arrivés à la vie politique, à la création d'États, à la constitution de nationalités indépendantes et il n'existait Pas entre eux ces conflits qui les ont fréquemment divisés dans ces dernières années. À propos de ce séjour à Smyrne, Dosithée a écrit dans ses Mémoires des pages qui mériteraient d’être connues de tous ceux qu’intéresse la renaissance hellénique au dix-huitième siècle.

Dosithée était possédé par la passion de l'étude. Il profita d’un séjour de quelques mois en Epire pour apprendre l’albanais. Au commencement de l’année 1769 il s’embarqua à Corfou et se rendit à Venise, d’où il passa en Dalmatie. Il vécut dans cette province en donnant des lecons et en rem-

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